Le Deal du moment : -28%
Précommande : Smartphone Google Pixel 8a 5G ...
Voir le deal
389 €

 :: Premiers pas :: Règlement Voir le sujet précédent Voir le sujet suivant Aller en bas
Maxime De la Marelle
avatar
Invité
Invité



Jeu 22 Déc - 18:45
Maxime De La Marelle
19 yo ✖ Féminin ✖ Hackers ✖ Etudiante ✖ Homosexuelle ✖ Vélo, roller, skate.

Questionnaire

– Musique préférée ✖ Enjoy the silence, Lacuna Coil.

– Série préférée ✖ The Simpsons.

– Animal préféré ✖ Un chat : chiant, adorable, indépendant. Un chat.

– Série ou Film ✖ Un film correspondrait mieux. Et ce serait le magasin des suicides.

– Copper ou Criminel ✖ Criminelle, je suppose.

– Compétences ✖ Hack. Ça paraît plutôt logique, hein ? J'aurais pu naître avec un clavier entre les pattes. C'est comme la continuité de mon corps. Je suis plutôt douée en ce qui concerne la recherche d'informations, et la protection de ces dernières. Mais ma spécialité, c'est le crackage. Pour le reste, je n'ai pas le permis, je me déplace en vélo, rollers ou avec mon skate. Et je tire à la carabine comme un manche. En revanche, je suis particulièrement douée pour disparaître.

– Crew ✖ Pour l'instant, je suis encore une indépendante. Me mêler à un crew, c'est augmenter les chances d'être captée par les flics.
Physique ✖ Caractère
Physiquement, je suis une fille très quelconque. Je n'ai jamais été le genre qui attire les gens vers elle. En réalité, on me remarque même très rarement, si je ne parle pas. Et encore, même en parlant, je ne me démarque pas forcément très bien dans un groupe. De toutes façons,
je préfère être seule dans mon coin dans tout les cas. Mais puisque nous sommes là pour causer de mon physique, mettons-nous y tout de suite.

Mon surnom "The crow" me vient très fortement de mes cheveux. Courts;
souvent plutôt en bataille, ils descendent à peine dans ma nuque. J'ai décidé de porter les cheveux courts pour plusieurs raisons, l'une d'elles faisant partie de ma tentative de rébellion. Mais leur longueur ne suffit pas à m'affubler d'un joli sobriquet. Le point central de ce surnom, c'est leur couleur. Mes cheveux sont d'un noir de charbon, de noir de jais, le noir qui n'a littéralement aucun reflet et qui parait creux, abyssal. Ce n'est pas spécialement attirant, j'en conviens, mais ce n'est pas moi qui en ai décidé ainsi. Petite, j'adorais m'imaginer avec des couleurs de cheveux extravagantes, mais je n'ai jamais vraiment osé sauter le pas de la teinture rouge, bleu. On me dit parfois souvent, en cours, qu'un mèche rouge ou bleue m'irait très bien. Peut-être aussi tout simplement que j'ai la flemme.
Pour ce qui est de mon potentiel niveau coiffure, soyons d'accord : coiffer des cheveux aussi courts que les miens, ça revient à les mouiller, sécher,
et laisser faire leur vie. De toutes façons, ça ne servirait pas à grand-chose de me prendre la tête à ficher des barrettes dedans, vu qu'elles disparaîtront dans la masse quand ils se mettront à onduler, boucler. Ce qui arrive très souvent. Dès qu'il y a une pincée d'humidité dans l'air, plus exactement.

Mes yeux sont gris. Oui, gris. Ils ont une couleur métallique très particulière.
Il paraît que, petite, ils étaient bleus. Mais faut croire que ça a tourné à autre chose en cours de route. Je crois que le seul truc que j'aime bien chez mes yeux c'est qu'ils sont grands, même si j'aime bien aussi leur forme en amande. La plupart du temps, je leur donne de la profondeur en les maquillant d'un épais coup de crayon noir. J'aime vraiment beaucoup l'effet "yeux de chat" que ça fait. Quelques fois, quand j'en ai la foi, je m'applique sur un smokey eye, mais ça n'arrive franchement pas souvent. Je ne suis pas une grande fan de maquillage. Je pense même d'ailleurs qu'on peut ajouter à ça que, en fait, je ne suis pas spécialement féminine.

Mon visage est... Banal ? Je ne vois pas comment le décrire autrement. Et oui, vous vous ennuyez. Mais mon physique est comme ça, j'y peux rien. Je suis l'average girl par excellence. On me répète sans cesse que si je faisais plus attention à moi (sous-entendu par-là si je devenais un pot de peinture), je serais casée et populaire. Mais ce n'est pas mon dada, alors autant rester la nana entre le naturel et l'artificiel que tu ne verras pas dans le coin de la pièce. S'il faut préciser, je crois qu'on peut dire que mon visage a des traits plutôt fins. J'ai même un nez légèrement en trompette, que ma famille adorait quand j'étais petite. Pour mes lèvres, je pense qu'on peut dire qu'elles sont plutôt bien fournies, charnues. Le détail qui tue chez moi, c'est mon grain de beauté. Petit, limite mignon, j'ai un grain de beauté situé au-dessus du coin de mes lèvres, sur la droite. 

Mon corps en elle-même, bonjour vous allez me détester, ne sort pas de la moyenne. Je mesure un sympathique mètre soixante-cinq, et je pèse dans les cinquante-cinq kilos. J'ai quelques cicatrices de scarifications sur les poignets et les cuisses, mais elles ont blanchies avec le temps. Pour ce qui est de mon style vestimentaire, j'ai opté depuis le lycée pour le tout confort.
Le seul truc pseudo-recherché de mon style, ce sont les accessoires. Je ne retire pratiquement jamais mon ras-de-cou, et en fait je retire pas spécialement plus souvent mes piercings aux hélix. Je suis simplement fainéante, d'accord ? Parce que vous aimez les détails : mon oreille droite est percée trois fois, et mon oreille gauche une seule, si on ne compte pas le bijou tout con des lobes.
Je suis une solitaire. Depuis le décès de mes parents, je n'ai plus parlé sérieusement à qui que ce soit. Je préfère être dans mon coin, à rêvasser, pester sur la vie.
Je suis toujours nettement plus créative en dessins quand j'observe les paysages au calme, sans le boucan qu'adore faire les autres peuplades de mon âge. Les soirées, les réunions autour d'un paquet de bières, très peu pour moi, voire pas du tout ce serait l'idéal. Mes meilleurs-amis ce sont mes feuilles de dessin, mes crayons et mes clopes. Au moins, eux, ils ne trahissent pas, et ne sont pas hypocrites.

Je trouve la société décadente, et vulgaire. Il n'y a plus de valeurs à protéger, on perd sa virginité dans une ruelle avec un bouffon qu'on a rencontré dix minutes avant en boîte, tellement défoncée qu'on ne sait plus où est la tête et où est le cul. Oui, la solitude, c'est le mieux que je connaisse. La plupart du temps, je m'isole à ce joyeux bordel avec d'autres alliés : mon portable et mon casque. Je suis une grande fan de musique,
bien que je ne joue personnellement pas, et les basses de la techno couvre toujours à merveille les rires stridents. L'autre avantage, c'est que je connais si bien la plupart des musiques que j'écoute que je ne suis plus déconcentrée à les découvrir quand je révise. Parce que, oui, je suis une tête. J'ai toujours trouvé divers moyens de m'évader, de m'échapper de ma vie de merde.
Il y a eut le dessin, les cours, et puis plus tard le hack. Mais même si je ne suis plus la gentille petite qu'on écrase sous sa botte, je reste une intello en puissance. Je n'étale jamais ma science, cela dit. En réalité, je pense qu'il serait plus judicieux de préciser tout de suite que je ne parle pratiquement jamais.

Discrète et silencieuse, je suis enfermée dans mon petit monde et je m'y trouve très bien. Pourtant, dans mon petit monde, il y a une étoile aussi brillante que le soleil. Cette nana, celle que je suis pendant ses courses de rue, je pourrais lui réciter les balades de la Lune pour lui faire plaisir. Enfin,
je pourrais. Pourrais si je n'étais pas aussi punaise de timide. Je cache souvent ma gêne ou mon embarras derrière un visage totalement blasé,
ma précieuse muraille pour qu'on ne comprenne pas ce que je ressens et qu'on ne vise pas là où ça fait mal. Je suis très maladroite au contact des autres, je n'ai jamais pensé développer cet aspect de ma vie non plus. En somme, je suis tout bonnement gauche en société. Mais de toutes façons,
il faudrait encore que je sorte pour voir du monde. Et ça, ce n'est pas près d'arriver de si tôt.

Je suis un peu sinistre, comme nana, je crois. Je ne sors pratiquement pas de moi, quand y'a personne là-bas. En revanche, si y'a du monde, je sors et je vais me poser dans le genre de lieux où tu n'enverrais pas même ton pire ennemi. J'aime les zones taguées, dégradées. J'aime ce qui a vécu, et qui est détruit, qui est marqué par un art violent et égoïste. La plupart du temps,
quand je sors, j'emmène mon sac avec moi. Le vétéran de guerre de sac en bandoulière qui trimbale partout mon matériel à dessin, mais également des babioles en tout genre, de la bouffe et mon ordi portable. Parce que je ne me sépare pratiquement jamais de mon ordinateur portable, idem pour mon téléphone. Pourtant, mon téléphone portable ne me sert pas à grand-chose,
sinon à prendre des photos dégueulasses de trucs qui me plaisent et/ou qui me font réfléchir. M'enfin, je préfère tout de même mon bon vieux appareil à polaroid, pour ce qui est de la photo. Quoique l'appareil en lui même et les pellicules me coûtent tellement cher que je ne le promène pas partout. Oui,
je préférerais péter mon ordi portable et mon téléphone plutôt que d'égratigner ce petit bijou à l'ancienne.

Quand vous fermez les yeux et que vous copulez avec Morphée, je suis bel et bien réveillée. Je suis une hackeuse, c'est le "moi" que j'ai créé pour me défouler. Les courses de rue, même si je n'y participe pas directement,
c'est mon exutoire. Je balance mon drone, pour suivre la progression de ma belle, comme si j'étais devenue sa bonne étoile, et ça me suffit. Quelque fois je bidouille à droite à gauche, je me glisse dans le deep web et je fais sauter quelques protections pour faire joujou. Je suis une criminelle, selon la définition du flic qui était venu une année nous mettre en garde contre le piratage et autres délits cybernétiques. Mais, franchement : je suis en études d'art, vous me croyez totalement saine d'esprit ?
Histoire
Le vent rugit, avec force, avec violence, la pluie battante me fouettant le visage avec une détermination claquante. Et je reste là, avec ma capuche qui manque de choir à chaque bourrasque, lesquelles sont nombreuses. A côté, ma camarade me regarde, aussi peu protégée par le préau que je le suis moi-même. Tout le monde a été s'abriter, et il n'y a presque plus de place pour nos petits pieds, maintenant. Je ne la regarde pas, même si elle me caresse la main, je fixe droit devant moi, mes yeux abîmés tentant de percer la sorte de brouillard qui m'empêche de voir clairement les plaques d'immatriculation des véhicules qui se garent un peu plus loin. Je savais pertinemment que s'ils étaient là, j'aurais reconnu la voiture. Je détourne le regard, même si mes pensées restent accrochées à ce temps qui me préoccupe. En rejoignant mes autres camarades, et ma meilleure-amie, je me fonds dans le troupeau, comme une brebis parmi tant d'autres. Et nous jouons, sous le préau, avec le peu d'espace que nous avons, discutons de nos vacances, de nos rêves, des discussions futiles mais rassurantes. Et soudain, en plein bavardage, un grand flash de lumière strie le ciel, avec fureur, un long hurlement plaintif s'extirpant de la masse de nuages noirs nous surplombant de haut. Toute la petite masse sursaute, certains crient même, et les adultes se précipitent, en tentant de garder une figure calme, nous ordonnant les uns après les autres de rentrer à l'abris. Et, comme les autres, je rentre, effrayée par cet orage soudainement réveillé.

Et les minutes, toutes, passent. Petit à petit, la salle se vide. Il y a de moins en moins d'enfant assit sur le sol. Ma meilleure-amie, compatissante, reste avec moi, quelques instants de plus, puis s'en va à son tour, secouant sa main vers moi en me disant que l'on se reverra. Et bientôt je suis la dernière. Le silence à peine troublé par les conversations des animateurs m'arrache le cœur. Quelque chose a éclaté à l'intérieur de moi, dans ma poitrine, comme une balle fragmenté aurait troué mes entrailles de part en part. Une sorte de panique s'empare de moi alors que les secondes s'égrainent. Et les animateurs murmurent, tout bas, en pensant que je n'entends pas. Ils se demandent quoi faire, pourquoi je suis encore là. Et je retiens mes larmes, comme une grande, comme je l'ai promis à papa. Ils appellent, m'emmènent avec eux faire le tour de l'école pour vérifier que tout est bien fermé, mais mes jambes peinent à faire le moindre pas à présent. Mon estomac tourne, roule, menace de me faire recracher mon goûter, et mes larmes se forment à mes yeux. Enfin, Clément arrive. Mon frère, essoufflé, à peine assez habillé pour affronter le temps, vient me chercher. Et en le voyant dans la salle, je m'élance vers lui. Il lâche son parapluie, et, alors que je m'attends à me faire envoyer sur les roses, m'attrape pour me serrer fort contre lui. Et je sens dans son étreinte qu'il souffre, qu'il a mal, qu'il a peur. Il sanglote, avant d'éclater en larmes, hurlant comme un soldat blessé. Et, ignorante, je me mets à pleurer à mon tour. Ses baisers couvrent mes joues, mon front, ses mains tremblantes, comme secouées, se perdent dans mes cheveux, les serrant avec désespoir. Et bientôt, sa voix, à peine audible, se glisse dans l'air, se tordant brutalement. J'ai du mal à respirer. Je sens que mon esprit se vide, que ma tête, qui me paraît si légère, devient tout à coup très lourde. Et alors que mes yeux roulent sous mes paupières, que mes jambes abandonnent leur travail, j'entends ses mots résonner une dernière fois, alors que sa voix crie mon prénom avec puissance. La foudre a frappé près de la voiture, qui est sortie de la route. Et un camion les a frappé. Papa et maman sont morts.

J'ouvre les yeux, en me redressant brutalement. Mon souffle roule dans l'air, brûlant, véritable magma dans ma gorge. Et, fébrile, je passe une main peu fiable contre mon front, avant de retomber contre mon oreiller. Je fais souvent ce rêve. Étalée, peinant à calmer mon coeur battant à tout rompre, je regarde vaguement mon plafond. J'entends vibrer mon téléphone portable. Alors c'est ça qui m'a réveillée ? Je ne regarde même pas, je ne bouge plus. Je sais de qui est cet appel. Et je n'ai pas envie de lui répondre. Le "Clément" clignote sur l'écran alors que le main theme de mario bros retentit. C'est lourd. J'attrape mon portable, après avoir frappé à répétition sur ma table de chevet pour le trouver, et fait glisser la flèche vers le cercle rouge. Mes cheveux à moitié sur le visage, collés par la sueur, m'embêtent et, après avoir lancé mon portable au bout de mon lit, je passe ma main pour les décoller, avant de la laisser retomber sur mes draps, au milieu des vagues froissées et anarchiques. Un râle, dans le couloir, me fait serrer la mâchoire. Et puis bientôt le vieux se met à hurler. Il rentre dans la chambre, en ouvrant grand la porte, en la faisant claquer contre le mur derrière, et me menace de me mettre à la porte si je ne descend pas tout de suite. Je lui lance un regard en coin, en lui faisant remarquer qu'il aurait pu frapper, d'une voix lasse. Et c'est la guerre ouverte. Il se rapproche, pour prendre un air supérieur, et me claque au visage, avec pas mal de postillons, qu'à son époque j'en aurais déjà pris quelques unes pour mon insolence et l'arrogance de mes yeux. Je serre à nouveau la mâchoire, suffisamment fort pour que ça en devienne douloureux, mais je me lève, attrape mes fringues sur ma chaise de bureau, mon sac de cours et passe sur son côté pour aller me ficher dans la salle de bain que je ferme à l'aide du verrou. Il hurle encore, frappe sur la porte, mais ça ne me touche plus. Je suis habituée, à force. Je sais qu'il va s'arrêter quand son souffle au cœur va lui dire qu'il est en train de faire le con. Peut-être, avec un peu de chance, que ma tante l'arrêtera avant qu'il ne se mette à s'égosiller que j'essaye de le tuer.

Je retire mon pyjama complètement crade à cause de la sueur, en prenant bien sûr tout mon temps, puis me lave en vitesse cette fois-ci, me réveillant à grands coups de jets d'eau froide, avant de m'habiller pour la journée. Et finalement, avant de quitter la salle de bain, je glisse mon casque sur mes oreilles, Mayhem à fond contre les tympans. En sortant, je le pousse légèrement, de l'épaule, pour qu'il dégage le passage, et déboule les escaliers presque deux marches par deux marches, pour passer devant la tante qui est encore scotchée à son téléphone portable, et enfin sortir. Dehors, il fait un temps merdique. Il flotte. Et y'a un vent à t'en faire voler des éléphants. Je visse ma capuche sur ma tête, après avoir bien calé mon casque, et grimpe sur le vélo appuyé contre une vieille chaise longue dans l'arrière du jardin. J'habite loin de mon bahut, mais le vieux refuse de me donner de quoi payer le bus, alors j'y vais soit à pattes, soit en vélo. Mais là j'ai honnêtement pas envie de traîner sous l'averse, même quitte à me casser la gueule, donc je préfère le vélo. En sentant une de mes shoes s'inonder, je grogne, mais pédale malgré tout. J'dois pas être en retard. Je regarde défiler les maisons, les voisins qui sortent vitesse grand V pour aller chercher leur journal avant qu'il ne soit plus lisible, et je rêve de la ville, la grande ville, là où personne connait personne. Depuis que les vieux m'ont récupérée, j'ai rencontré un peu tous les blaireaux du coin qui s'amusent à coller avec le fait que, gamine, ça t'es déjà arrivé de gerber dans le bus scolaire. Ça paraît con, et ça l'est, mais ça me poursuit encore maintenant, et au bout d'un moment c'est très chiant.  Moi, je m'en balance de la popularité, de la mode. Tout ce que je veux, c'est me barrer d'ici le plus vite possible. Et pour ça, j'dois taffer comme une tarée. La tête toujours dans mes bouquins, avec ma musique dans les oreilles pour ignorer les petits cons qui se croient drôles, j'suis la seule dont les camarades connaissent peut-être mieux le Q.I. que le prénom. On me prend pour la petite demoiselle parfaite, mais j'en ai même pas la gueule. Vu que le vieux est un radin sévère, je récupère des fringues à droite à gauche, je fixe les miennes quand ça part en live, et du coup j'ai un look de mec. Ce qui est plutôt drôle vu qu'en cours j'ai tendances à attacher mes cheveux en deux tresses pour être tranquille. Je suis le parfait cliché de la campagnarde, en fait.

Y'en a qui sont nés sous une bonne étoile. La mienne a dû oublié que j'étais encore là. Je soupire, en freinant, pour descendre de mon vélo et aller le ranger. Je sors la chaîne de mon sac, en protestant tout bas contre cette pluie diluvienne, et, en entendant une voix qui ne m'est pas inconnue, lève la tête. Il passe, tranquillement, les cheveux livrés à cette averse, en riant. Et ses "fans" passent derrière, tentant certainement d'attirer son attention avec des dialogues sans queue ni tête. Je le regarde, un moment, et puis détourne le regard. C'est pas intéressant. C'est sa dernière année ici de toutes façons. Malgré moi, je relève le regard, et croise le sien. Trou du cul. Clément s'arrête, me fixe. Et je rejette mes yeux sur la chaîne de mon vélo, pour l'ignorer. Voir sa gueule ça me donne envie de dégobiller. On pourrait se dire que j'aime juste "pas" mon frère. Mais c'est bien plus que ça. Petite, j'adorais mon frère. Je lui courais toujours après, même s'il me repoussait parce que j'étais une fille et donc une petite chose fragile par extension. Et puis peu après la mort de nos parents, il a "disparu". Il m'a laissé chez les vieux, sans rien m'expliquer de plus, en me disant seulement que je devais être forte et ne pas pleurer. Mais à lui, je ne lui ai rien promis, pas comme à papa. Et maintenant, si je veux chialer comme un bambin, j'en suis tout-à-fait libre. Il m'a lâchée, m'a laissée seule, en prétextant qu'il ne pouvait pas m'emmener. Et je l'ai attendu. Je l'ai attendu comme je les avais attendu, avec l'espoir qu'il revienne me chercher, qu'il me serre contre lui et qu'il me dise que tout allait bien se passer. Mais  il n'est revenu que cette année, en milieu d'année, après avoir redoublé. Et lorsqu'il m'a vu, il m'a ignoré, pour retourner discuter avec les amis qu'il s'est fait, qui ignoraient tout du fait qu'il crevait sa sœur à coups de silences. Je ne sais pas ce que j'ai espéré, à ce moment-là, mais quoi que ça ai pu être, ça s'est cassé la gueule sévère. Depuis, je peux simplement plus le blairer. Leçon à retenir : Maxime, les gens populaires sont des enculés. Et des mal-enculés.

Les nerfs encore en pelote, je donne un grand coup de pied dans mon vélo sous les yeux de quelques élèves dont j'avais oublié la présence. Et, soudainement blessée, bouleversée, je m'accroupis, posant mes mains sur les côtés de ma tête après avoir rejeté mon casque dans ma capuche. Il me gonfle. Il s'exhibe presque, comme ça, sans la moindre gêne, alors que moi je bouffe le sol jour après jour pour essayer de survivre à l'autre taré qui frappe sur les portes. Je me redresse, après quelques instants, et me mords la lèvre. Allez Max, tu peux l'faire. Les cours c'est bien fini, et tu pourras te barrer de ce trou paumé et aller vivre la belle vie dans la grande ville. Et je verrais plus sa sale tronche d'hypocrite ! La motivation revient à l'assaut, m'enflamme. Et, dans la tête, j'ai un mini-moi qui prend feu, façon manga, avec un volcan dans le dos. Je peux le faire. Un pas après l'autre, les jambes et les bras bien droits, je rentre dans cette fichue école pour me jeter dans ma salle et m'asseoir à ma place. Les autres me regardent, en arrivant, mais ne me disent pas bonjour. Je suis une plante verte, mais c'est tout mon intérêt. Au moins, ils ne viennent plus me déranger pour me demander les réponses aux contrôles et me lâcheront pendant les examens. Je sors mes affaires, range mon casque après avoir éteins ma musique, et revoilà Maxime la grosse tête. Deux tresses à mes cheveux, pour ne pas qu'ils m'embêtent, et je mâchouille déjà le bout de mon crayon de bois. Ce test, je le connais comme ma poche. Si ce n'est pas mieux, d'ailleurs. Il n'y a aucune question qui ne me bloquent. Mais le véritable travail, c'est certainement de rester concentrée sur ma feuille, et non sur l'autre crétin qui tourne dans ma tête. Et le temps s'écoule. Finalement, j'entends la sonnerie. Et le sors de mes calculs. Je m'étire longuement en poussant ma feuille sur le coin de mon bureau du bras qui n'est pas dans les airs. Je suis certaine que j'ai réussi. Plus qu'à aller la voir, elle. Oui : "Elle".

Je range mes affaires, à la va-vite, et me lève de ma place pour rejoindre l'entrée de la classe. Et elle est là. Son habituel sourire aux lèvres, elle me regarde, m'attendant visiblement depuis quelques minutes. Je la fixe, avec mon air le plus neutre, et feins de ne pas avoir remarqué sa présence. Allez. Fais-le. Elle me tapote sur l'épaule, légèrement plus grande que moi, et un sourire m'échappe. Elle est décidément trop prévisible. Mais en même temps, elle invente toujours de nouvelles choses, de nouvelles façons de me surprendre. Si bien que, la plupart du temps, je ne devine que la partie émergée de l'iceberg. En marchant dans le couloir qui se vide peu à peu, je me rapproche stratégiquement. C'est gênant, mais je ne peux pas m'en empêcher. Je la regarde autant que j'esquive son regard. Et mon cœur accélère à chaque fois que nos yeux se croisent. J'ai envie de secouer la tête, de me réveiller et de retourner dans mes bouquins, là où je n'ai aucune surprise, mais elle reste là, à me taper la causette. De temps à autres, elle lève une main, salue un autre élève qui passe. Et je me fais petite. J'm'écrase. J'ai ni envie d'être prise pour celle qui veut se taper la divine Juliette du bahut, ni envie qu'on la fasse suer parce qu'elle traîne avec miss tresses. Elle et moi, on va pas du tout ensemble. Même si j'ai sans cesse envie de la connaître un peu plus. Dans le couloir encore bien bruyant, je m'étonne de ne pas avoir remit mon casque. D'habitude, en sortant d'un exam', j'aurais simplement foncé à la cafet' pour me taper un café, et j'aurais été me paumé dans mon coin de la cours pour ne pas qu'on me lourde. Mais cette idiote est là. Lucile Edelle, la bombe sur laquelle ils et elles bavent tous. Par "ils" j'entends ces pauvres mecs qui ne doivent la résumer qu'à, grand maximum, quatre parties de son anatomie. Et par "elles", j'entends bien évidemment par-là les greluches qui me répugnent. Mais elle me suit, me parle, même si je ne lui réponds que par phrases monosyllabiques. Elle me demande comment s'est passé l'exam, si je le sens bien, si je compte faire un truc après les cours. Mais personnellement, tout ça, je m'en fiche pas mal. Je m'arrête, en voyant de ses amis plus loin, et fronce les sourcils en plissant les yeux. Mes lèvres, alors, bougent, et je lui réponds enfin clairement. Elle me dérange. Lucile me regarde, sans même paraître vexée, me sourit et puis s'éloigne. Entre nous, ça a toujours été comme ça de toutes façons. Et ce depuis la première fois qu'on s'est parlé. Avec le temps, on s'étaient en quelque sorte rapprochées. Mais c'était souvent parce qu'elle avait la maladie du justicier et qu'elle venait toujours me sauver les fesses quand on se payait ma tête.

Je soupire longuement, en levant le nez vers le ciel. Il pleuviote encore un peu. Je remet ma capuche sur ma tête, après avoir installé mon casque, et je sors m'installer dans un parc non loin. J'ai un gros trou dans mon emploi du temps. Et puis, selon l'école, c'est notre problème si on ne revient pas. Sous un arbre, sur un banc que j'ai essuyé avec ma manche, je sors mon crayon de ma chemise bleue et verte d'arts. Et je me mets à dessiner, la musique encore frappante dans mes oreilles. J'ai juste envie de me vider l'esprit. D'oublier tout le monde, et de me concentrer sur mon avenir. Mais l'inspiration ne vient pas. Je tapote le bout de mon crayon contre ma tempe, et soupire encore une fois un véritable petit ouragan. J'ai tellement peu de conviction. La vie d'étudiante, c'est monotone. Mais c'est ce que je préfère, pas vrai ? Comme une mauvaise héroïne de shojo, je me mets à penser à cette bizarrerie du monde. Et si elle arrivait ? Sortant de nulle part comme un chevalier servant, elle me sortirait de cette vie de merde à courir après les étoiles ? Je ris. Jaune. C'est pas ça, la vie, ma cocotte. Seule, sous la pluie légère, à l'abris d'un arbre aussi solitaire que moi, je contemple l'absence de ma vie sociale. Depuis la mort des parents, je me suis toujours convaincue que c'était mieux de ne s'attacher à personne. Le connard qui me servait de frangin avait déserté, et le reste de la famille n'était foncièrement pas mieux. Je tire vers moi mon sac, l'ouvre, et sort mon paquet de clopes. Les yeux fatigués par les nuits blanches à réviser, je ronchonne à la lumière vive de mon briquet. Et puis c'est la délivrance. La fumée me gagnant quand je tire sur le bâtonnet de nicotine, avant que je ne la libère progressivement, je pousse au loin ces pensées à la con.

En réalité, quand j'y pense bien, ma vie de famille avant l'accident n'était pas passionnante. Elle n'était même pas spécialement joyeuse non plus. Mes parents étaient des gens simples, mais occupés, qui essayaient de maintenir le navire à flot, en le réparant avec des gros morceaux de scotch et des restes de ficelles. A ce moment déjà, on était tous des funambules, sur le fil tendu et riquiqui. Malgré ça, certains jours me manquent. Même pas les jours spéciaux comme les fêtes ou les anniversaires. Non, ce qui me manque le plus, ce sont les jours normaux, ces jours sans rien de particulier. Ces jours avec une foutue routine que tu détestes mais que tu finis par aimer quand tu en sors. On déteste tous le temps qui se répète, on veut de l'aventure et du risque. Et puis, quand on tombe de notre nuage, on se ramasse la gueule en bas de l'escalier du paradis. Ça arrive à tout le monde, tout l'équipage avale sa salive de travers, mais c'est notre catastrophe. Notre désastre. Et on se coupe du monde, on pleure et on enrage, on rejette tout comme si rien n'avait plus de valeur. Je tire encore sur le bâtonnet, une longue bouffée que j'expire en formant des ronds pour me détendre. La fumée m'enivre, délicieusement, et je ferme les yeux quelques instants. C'est ridicule, tout ça.

Je ne suis plus celle que j'étais avant, de toutes façons. La gentille fille, qui a même la tronche de l'ampoule, et qui aide tout le monde. Je me suis faite bouffée, vomir et re-bouffée. Alors j'ai sorti les crocs. Il n'y a personne sur cette basse terre qui en ai quelque chose à faire de ma petite personne. Alors pourquoi continuer à m'inquiéter pour les autres ? Des pas qui se rapprochent me font rouvrir les yeux. C'est encore elle. Elle grimpe sur le banc, pose son sac et s'asseoir sur le bord du dossier. Sa tête, en se tournant vers moi, elle me sourit comme un ange. Et ses grands yeux comme deux noisettes trop mûres me soulèvent du sol. La sensation est vraiment... étrange. Je détourne le regard, et nous contemplons le silence. Pour une fois, elle ne dit rien. Elle me regarde, regarde le paysage, joue avec ses cheveux hésitants entre le châtain et le roux. Et quand je prend enfin mon courage en main pour la regarder, son sourire a disparu. Elle me fixe, à présent, avec cet air de gravité, comme si j'avais fais une connerie. Ma cigarette s'essouffle, et elle se rapproche pour me la prendre des lèvres. Sur l'instant, je fronce les yeux. Et puis, c'est la surprise qui prend le relais sur mon visage, alors qu'elle amène ce même petit suicide sur le long terme à ses propres lèvres. Et j'avale ma salive de travers. Je me retape la dégringolade des escaliers du paradis, alors qu'un ange me siffle à l'oreille que j'assiste à quelque chose. Aucune réaction. Je suis comme figée, en pause, j'ai freezé. Le temps, pourtant, gobe les secondes à l'affilé. Elle me rend ma cigarette, m'embrasse la joue comme un remerciement quelque peu inapproprié, et s'éclipse comme elle est venue : à l'improviste.

C'est collé dans mon esprit, ça refuse de partir. Et un bon milliard de questions s'entrechoquent dans ma petite tête déjà à moitié fendue. Je sursaute, en remarquant que l'eau de mon bain refroidit. Quelle atroce transition. J'ai fini la journée par automatisme, et maintenant je me retrouve comme une quiche a prendre un bain. Toute la mousse est partie, et je peux voir mon corps au travers du liquide. Rien de glorieux, honnêtement. Je suis quelconque, comme nana. J'ai au moins, cependant, l'avantage d'être tellement dans la neutralité physique que je ne suis ni trop maigre ni trop ronde. Je soupire, encore une tornade quelque part dans le monde je suppose, et je recule dans le bain, pliant mes jambes pour immerger ma tête jusqu'à mes oreilles. Celles-ci sous l'eau, les sons se distordent. Tout est flou, brumeux, tout a une sonorité différente. J'entends encore, de loin, le claquement de ma tante qui coupe des carottes dans la cuisine non loin. Je l'entends, mais le son est très différent, comme si ce n'était plus du tout la même action qu'elle effectuait. Ma main gauche paresse contre mon ventre, le caresse machinalement, et je me laisse submerger progressivement. ... Non ! Je me redresse vivement, le souffle coupé par la peur soudaine. L'eau éclabousse, celle du bain manque de déborder sous le geste ample, se balançant hystériquement. Putain. J'ai envie de chialer. Je me roule en boule, alors que le froid de la pièce mord allègrement dans ma chair, me faisant frissonner. Et mes mains venant se glisser dans mes cheveux, je retrouve ce geste désespéré : les parcourir de caresses maladroites, fébriles. Exactement comme les caresses de Clément ce jour-là. Et les larmes affluent. Elles s'écoulent le long de mes joues, perdant un goût salé désagréable sur mes lèvres abîmées par le vent froid de la saison. Je suis toute seule, n'est-ce pas ? Je lance des bouées à la mer sans cesse, mais les ramènes à moi toujours avant que quelqu'un ne rejoigne ma barque. Et j'affronte toute seule l'orage, le tsunami de ma pitoyable vie.

En sortant du bain, livrant mon corps au froid, j'attrape en vitesse une serviette que je noue autour de ma poitrine. Et puis, comme une brute, dans un geste hargneux et sans la moindre élégance, sans le moindre raffinement, je me saisis de mon téléphone portable posé sur la malle à linge sale. Et, sans hésitation, je parcours mes contacts jusqu'à la lettre C. Mon doigt glisse sur la gauche la ligne du contact, et l'appel se lance. Quelques secondes après le début des sonneries, mon interlocuteur répond. La voix peu sûre, il avance un " Max ? ", auquel je n'arrive pas à répondre. Bordel, ça fait un mal de chien. Je me laisse tomber par-terre, dans un bruit sourd, et les larmes reprennent de plus belle. Putain de merde ! Je suis enragée contre moi-même ! Il ne dit plus rien. N'appelle plus mon prénom. Il ne me dit pas que ça va aller, que tout va revenir à la normale. Comme moi, il sait que c'est impossible. Qu'on est coincés dans cette merde sans nom, et qu'on doit survivre l'un sans l'autre. C'est son choix, je dois le suivre. Mais, bordel, pourquoi Clément est un sombre connard qui pense qu'à sa gueule ? J'ai l'impression d’étouffer, de suffoquer. Peut-être que je suffoque vraiment, en fait. Sa voix ressort, plus forte, et appelle mon nom. Le son résonne dans l'oreille collée contre le téléphone. Stop ! J'appuie sur le bouton de veille sur le côté, coupant l'appel net, et balance cette foutue malédiction à travers la pièce, le laissant s'écraser et le boîtier arrière se démonter et choir en bas de la porte de la salle de bain.

J'ai coupé mes cheveux, ce matin, avant d'aller en cours. Quand le vieux a débarqué dans ma chambre en gueulant comme un putois, il a remarqué les ciseaux dans mes mains et est ressorti aussitôt, en s’époumonant que j'étais dangereuse. Au final, je m'en fou. Je le suis peut-être, oui. J'ai coupé à travers mes mèches noires comme une forcenée, et les morceaux sont tombés par-terre, où ils se sont vite amassés. On en reparle, des cheveux qui m'arrivaient aux nibards ? Non. C'est plus qu'un souvenir. Maintenant, c'est décidé, ils sont courts, ils font un carré vague, ondulé. J'ai laissé ma frange, qui avait poussé, et je l'ai calée légèrement sur le côté. C'est plutôt pas mal. En glissant mes doigts dans ce bazar organisé pour décoller les dernières mèches coupées, épousseter ma nuque, j'esquisse un sourire de satisfaction. A Dieu, Max la pleurnicheuse. J'ai trouvé ma voie, finalement. En descendant une fois prête à sortir, je croise ma tante. Elle me regarde, une poignée de secondes, et puis retourne à son téléphone. C'est peut-être mieux comme ça. En cours, ça a choqué tout le monde. Ils lorgnaient comme des petits animaux effrayés sur mon gros trait de crayon, mon épais trait d'eye-liner. Et, personnellement, je m'en contre-fou. Ça leur fait un choc, c'est un gros virage pour la fille mirage, mais je vais redevenir cette fille-là rapidement au bout du compte. Je n'ai pas fais ça pour eux, de toutes façons.

Bienvenue au lycée, le royaume des "grands" comme ils le disent. Certains s'en foutent, d'autres en font trop. C'est un peu le monde qui s'étale sur une école, et salit automatiquement ses murs. On vous a dit que le lycée ce serait plus de liberté, trouver plus facilement sa place ? Et qui vous dit que les autres vous laisseront tranquillement à votre place, justement ? Ici, c'est la jungle. Et je ne suis pas une lionne. Je ferme la bouche, avec insistance, en essayant de tenir en apnée. Malgré moi, l'eau me rentre par le nez, affole ma tête. Je ne devrais même pas me débattre. Mais mes jambes frappent dans le vide, mes mains essayent encore de pousser la cuvette pour m'en éloigner. Ça ne donne pas de remords à mon bourreau, qui en rit bien d'ailleurs. Il me maintient la tête dans l'eau encore une poignée de secondes, de très longues secondes, et puis lâche prise dans mes cheveux. Je sais qu'ils sont satisfaits. Je ne le vois pas, mais je le sens. Je me laisse tomber sur le carrelage crade, et attend que le temps disparaisse. Que le choc passe. Je respire, mais c'est un goût dégueulasse qui se loge aussitôt contre mes papilles gustatives.

Je fini par me lever. J'ai les jambes toutes flasques, je titube, je vacille comme un bout de bois flottant à la dérive sur une mer agitée. Quelques nanas me regardent passer. Certaines choquées, outrées, d'autres simplement bien amusées. Je colle ma tête sous un lavabo, pour essayer de me débarrasser du mélange qui refoule une odeur prête à me faire vomir. Une fille tapote mon épaule, mais je m'en fou pas mal. Elle s'en va en courant. C'est certainement la seule chose à faire. Je perds la notion de temps. Au final, je doute de pouvoir retourner en cours comme ça de toutes façons. Alors pourquoi m'inquiéter de la sonnerie ? Un choc me rentre dans les côtes. Non, ça, c'est plutôt un coup. On me tire la tête de sous le lavabo, et je peine à voir clairement en face de moi. C'est Elle, je l'entends. Mes yeux brûlent, mon mascara a coulé. Elle me passe ses mains sur le visage, et je sens qu'elles tremblent. Elle va pas bien. Une gifle me réveille à moitié. La deuxième m'achève. Elle hurle, s'égosille. Je ne savais même pas que Lucile avait autant de force dans la voix. Elle m'ordonne d'en parler à l'administration, mais je sais que ça ne servira à rien, que ça me fera passer pour la pauvre petite chose qui a besoin de l'aide des adultes pour survivre au bahut. Elle ne me laisse pas le choix, finalement. Elle se saisit de mon poignet, de l'autre main lance nos sacs sur l'une de ses amie, et nous entraîne à l'extérieur. Direction l'administration.

Les jours passent. Et Lucile est scotchée à moi. On dirait que j'ai un bulldog, maintenant. Assise au parc, sur mon banc habituel, je regarde autour de moi. Elle est venue avec moi, avec ses amis. Ils discutent tous, j'entends parfois mon prénom sortir, mais ça ne m'intéresse pas. C'est ça, un groupe d'amis ? Ce n'est pas mon dada. Une fois ma clope aussi consommée que possible, je hisse une bretelle de mon sac sur mon épaule, et m'éloigne. Elle fait signe à son petit groupe, et me rejoint. Sa main se glisse dans la mienne, alors qu'elle appuie son bras contre le mien en me souriant. Elle m'apprécie. Ou, plus exactement : elle m'aime. Elle m'aime parce que je suis un cas désespéré, parce que je suis celle qui la fera toujours se sentir forte. Sûr que, en comparaison, je suis un bulot. Je traîne les pieds dans le gravier, passe une main rapide dans mes cheveux pour libérer légèrement ma vue. Et puis, après de longues minutes de marche dans le silence, elle me tire sur le côté. Je grogne, par pur réflexe, et elle secoue la tête. Cette fois-ci, je ne pourrais pas fuir.

J'ai fini chez elle. Mon téléphone portable vibre sur la table basse. Mais, à vrai-dire, je n'ai pas même l'occasion de m'en saisir. Assise sur le canapé avec elle, sa tête sur mes cuisses, elle regarde la télévision où passe un film. Ou une série. Aucune idée, je ne suis pas de toutes façons. Et puis, personnellement, je préfère la regarder. Lucile est belle. Alors pourquoi reste t-elle avec moi ? Je glisse ma main près de sa joue, et pousse une mèche derrière son oreille. Et finalement, peut-être que c'était un message codé sans même que je le sache. Elle se redresse, me regarde avec un semblant de surprise éphémère sur le visage. Alors qu'elle se rapproche, j'ai envie de me jeter par la fenêtre. Dans ma poitrine, mon cœur me hurle que c'est une connerie, que je vais finir par me noyer dans cette histoire. J'ai oublié Clément, ma tante, mon oncle, j'ai oublié tout le monde. Ses lèvres s'appuient contre les miennes, ses mains sur mes cuisses pour se tenir étirée vers moi. Et encore, encore et toujours, je me casse la gueule. C'est pire que tout ce que je connais, ça me renverse le crâne, ça l'ouvre en deux en un claquement de doigts. Nos lèvres se pressent, et je fini allongée sur le canapé, où elle me pousse. Ça va trop vite. J'ai une boule dans le ventre, ça tourne comme un putain de carrousel.

Elle m'utilise, m'épuise. Elle m'enivre en ne faisant que glisser ses mains sur ma peau. Il fait froid, dans le salon, mais j'ai le feu sous la peau. Mon corps meurtri tremblote, et elle invite ma tête contre sa poitrine, me caresse les cheveux, me murmure que tout ira bien. Je sais qu'elle adore ça, qu'elle aime me dire qu'elle me protège. Mon cœur se fend un peu plus à chaque tendresse, à chaque gentillesse. Je sais que tout ça, c'est de la poudre aux yeux, c'est faux. Lucile, elle ne m'aime pas réellement. Peut-être que j'ai une signification, ou quelque chose du même genre, mais elle ne m'aime pas sincèrement. Ça me va. Elle m'utilise, alors qu'on se mêle, que nous oublions jusqu'à la télévision toujours allumée, et je reste sans défense. Je suis le courant. Elle est froide. Son corps est bouillant, communique au mien cette fièvre, son visage barbote dans des expressions à m'en rendre folle, mais ses yeux sont froids comme la glace. Un bref instant, j'y aperçois une lueur, un crépitement. Mais le tout disparaît en un battement de cils. Une illusion. Je me fais des idées, et j'en suis certaine. Je lui offre mon tout, je lui offre mon extérieur et mon intérieur, je m'ouvre la poitrine pour elle, pour qu'elle y plonge les mains et m'arrache le cœur, qu'elle l'écrase et l'avale. C'est ça, l'amour. Accepter d'être blessé, accepter de souffrir. Nos corps mit à nus finissent par s'entasser sur le petit espace du canapé. Blottie contre moi, elle reprend de regarder la télévision. Elle rit, décoche la flèche qui vient se planter en plein dans mes sentiments misérables. Elle a loupé sa scène préférée, qu'elle me dit. Je niche mon nez dans ses cheveux, hume leur odeur, et je soupire en lui caressant le dos. Je vais bien. Pourtant, j'ai envie de vomir. J'ai envie de tout recracher, tout cet amour factice qu'elle m'a lancé au visage en me promettant les étoiles. Les étoiles, ce ne sont pas des gommettes pour marmots. Mais je ferais avec. Je ramasse sur le sol de mon amour propre ses sourires, ses regards, ses caresses, ses murmures. Je les cueilles, tous, et les adores profondément.

Cette comédie a duré des mois durant. Se tenir la main devant les potes, s'embrasser en vitesse en se croisant dans les couloirs, parfois sortir boire un coup ensemble. Et puis, le pire : recommencer sans cesse devant ce même film. Ses parents pensent qu'elle sort avec l'un de ses amis, alors même pour eux je suis un fantôme. J'aurais cru que les choses auraient été autrement. Mais non, c'est visiblement aussi simple que ça. Les saisons ont défilées, les unes après les autres. Et, à l'hiver arrivant, à la fin du voyage se profilant au loin, elle m'a invité chez elle. Elle n'a pas mit "ce" film, s'est assise à table. Son visage souriait, mais je devinais qu'elle n'avait pas envie de rire. J'ai posé mon sac, je me suis assise en face d'elle. Elle a armé ses mots, et puis a fait feu. J'ai été percée de toutes parts. J'ai gobé la trahison. Je l'avais sentie venir. Le silence enveloppe les environs, brisé à un intervalle régulier par le tintement de ma cuillère qui heurte le bord de ma tasse remplie de chocolat chaud. Mon dos tombe, devient rond. Non, je ne vais pas pleurer. Je souffle sur la surface marron clair, pour encourager le liquide a se rafraîchir. Mes oreilles sifflent. Elles vibrent rageusement. Les flèches s'amassent dans ma peau, alors qu'elle poursuit son monologue de reproches. Oui, je ne suis pas la petite-amie parfaite. Je ne suis certainement même pas faite pour être une petite-amie en premier lieu. J'avale mon chocolat chaud, brûle ma gorge comme la vérité qu'il faut que je fasse descendre. Mes yeux sont froids de l'intérieur. Je sens que je vais finir par pleurer. Je me lève, en poussant ma chaise, et puis me penche pour prendre mon sac, et m'en vais. Je devrais la retenir, lui dire que moi je l'aime comme une folle, malgré tout ce qu'elle me fait. Mais ça n'aurait aucun sens. Dehors, je fiche mes chaussures dans la neige, et me crève les tympans avec le bruit de son crépitement, le vrombissement du moteur des voitures qui passent.

Le temps s'écoule. J'ai rejoins un cursus artistique, pour faire taire l'oncle et la tante. Au moins, je fais quelque chose qui me plaît, quand je vais en cours. Même si, à vrai-dire, je n'y vais pas souvent. Je reste enfermée à la maison, leur nouveau "chez eux". Nous avons déménagé quelques mois après ma rupture, bien que ce ne soit pas du tout la raison de ce déplacement. Mon oncle a retrouvé un job, et ma tante voulait être plus près du siège de la société pour laquelle elle passe son temps au téléphone. Au final, ils ne sont jamais là. Mais ça m'arrange bien. Dans le noir de ma chambre, j'allume l'écran de mon ordinateur. Il jette sa lumière, perd sur les murs recouverts de toiles des reflets variés. Je m'installe en boule sur ma chaise de bureau, une couverture sur les jambes pour ne pas avoir froid, bien que ça me refile un air de mémère. Je parcours en vitesse mes messages, fais le tour des informations importantes du moment. Pour m'occuper j'avance même un projet personnel. Et puis, en bas, l'heure bouge. Ça va commencer. Je m'étire, sort de mon cocon en embarquant avec moi la manette posée sur le bord de mon bureau. Je rejoins la fenêtre, et regarde en contre-bas quelques secondes. Je pousse le bouton rouge, qui devient vert, et dans un bruit continuel de vibration, soulève de ma table de chevet le drone qui suivra mon petit péché mignon. Je sais qu'elle est là, un peu plus loin dans la rue. Je vois, sous la lumière vulgaire des néons des bars en contre-bas, briller le rouge de sa moto. C'est infime, vraiment minuscule, mais le drone lui le voit parfaitement. Je le ramène à l'intérieur, en me reculant de la fenêtre pour qu'il ne me coupe pas avec ses hélices, et attrape mon téléphone portable. Je regarde la liste de mes contacts, qui a prit du volume depuis que j'ai démarré mon travail de nuit, et appuie sur la petite enveloppe à droite du "Sid". Je marque en vitesse les rues a éviter, en fait la liste. Alors que mes doigts tapotent sur les touches sur l'écran, mon cœur bat fort. En emménageant ici, j'ai été un soir réveillée par des cris en bas de ma fenêtre. J'ai jeté un coup d’œil, et j'ai vu cette moto rouge passer à toute allure. J'ai suivi les rires du regard, avant qu'ils ne disparaissent dans la cohue de la ville. New-York, c'est autre chose que ma campagne française. Et puis... je suis tombée amoureuse d'elle. J'ai eu un coup de foudre à en faire trembler le nirvana. Foncièrement, je ne connais personnellement rien d'elle, si ce n'est ce que j'en entends. Mais je ne peux pas m'empêcher de lui apporter mon soutien, lorsque le soir et les courses viennent.

Pour une fois, j'essaye d'attraper une véritable étoile, et non pas des gommettes.
FAITH
Mary ✖ 18 yo ✖ Code miamé ✖ En le cherchant. 8") ✖ O.C Ilya KUVSHINOV ✖ Taylor Lashae

Revenir en haut Aller en bas
Page 1 sur 1
Sauter vers: